OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Hollande en 309 citations vérifiées http://owni.fr/2012/05/07/hollande-president-elu-verification/ http://owni.fr/2012/05/07/hollande-president-elu-verification/#comments Sun, 06 May 2012 22:09:40 +0000 Sylvain Lapoix et Marie Coussin http://owni.fr/?p=109227 fact checking, permettant une lecture critique inédite des programmes et des discours politiques. Comme l'a proposé Le Véritomètre OWNI i>TÉLÉ au fil de cette campagne. Mais avant d'entamer la vérification du prochain quinquennat, honneur au vainqueur. Nous avons vérifié 309 citations de François Hollande durant toutes ces semaines. Beaucoup étaient exactes. Mais il y avait aussi de grosses boulettes. Les voici. Représentant autant de vrais sujets de révision pour le nouveau Président avant de se mettre au boulot.]]>

Place de la Bastille le 6 mai 2012 par © Eric Bouvet via Picture Tank.

La course vers la magistrature suprême du candidat socialiste a été semée de chiffres. Pendant trois mois d’écoute des discours de François Hollande, au fil de 35 interventions, 309 citations chiffrées ont été passées sous la loupe des vérificateurs d’OWNI. Sur l’ensemble de ces déclarations de François Hollande, 43,4% d’entre elles se sont avérées correctes, 35,3% incorrectes et 18,1% imprécises.

Au final, la crédibilité de François Hollande sur les propos que nous avons vérifié s’élève à 55%, le plaçant en troisième position des six candidats examinés, derrière Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly, 9,2 points au dessus de son concurrent de second tour, Nicolas Sarkozy.

Mais, dans le détail des chiffres, il ressort clairement que certaines des propositions clefs du programme du candidat ont été défendues avec des chiffres incorrects. Des finances de l’État au prix de l’énergie en passant par les emplois publics, nous avons mis en lumière les points faibles de l’argumentaire de campagne du nouveau Président.

505 milliards

“Je veux redresser la France” était le titre du premier chapitre du programme du candidat Hollande et la 9ème de ses 60 propositions portait sur le retour à l’équilibre des finances publiques. Par cinq fois, cependant, il s’est lourdement trompé sur la dégradation des comptes de l’État, attaquant ainsi le bilan du Président sur ce point dans l’émission “Des paroles et des actes” sur France 2 le 11 avril dernier :

Ce n’est pas moi qui présente un bilan avec une dette publique de 600 milliards d’euros augmentés

Or ce bilan, justement est sensiblement inférieur : selon l’Insee, les comptes de l’année 2007 s’étaient clos sur une dette publique de 1211,6 milliards d’euros. Le dernier exercice, lui, a vu 1717,3 milliards de dette pour les comptes nationaux. Au total, il s’agit donc de 505 milliards de plus, et non 600. Argument de François Hollande pour défendre cet écart, sur lequel Nicolas Sarkozy a insisté lors du débat d’entre-deux-tours, il se base sur des projections sur l’exercice 2012. Or, depuis le début de notre exercice, nous avons refusé de nous baser sur des hypothèses, ce qui nous amène à rejeter cette justification.

Sous-estimé

Parmi les mesures du candidat PS les plus critiquées par ses adversaires, la création de 60 000 postes d’enseignants sur le quinquennat arrive certainement en tête. Là encore, pour la défendre, il s’appuyait sur les réformes mises en oeuvre par son prédécesseur à l’Élysée, notamment en matière de réduction d’effectifs, suivant un chiffre répété à quatre reprises dans les interventions que nous avons vérifiées :

Je rappelle que 80 000 [postes dans l’Éducation nationale] ont été détruits, ces cinq dernières années !

Mais les rapports annuels de l’Éducation nationale ne tiennent pas tout à fait le même compte des effectifs. Tous personnels confondus (enseignants et non enseignants), le ministère est passé du 1er janvier 2007 [pdf] à fin 2011[pdf] (derniers chiffres disponibles) de 1 209 828 agents à 1 108 217, soit 101 611 postes de moins. Une marge d’erreur de 21%, importante, mais moindre que quand il avait déclaré dans l’émission Dimanche + , une semaine après le 1er tour, que “60 000 fonctionnaires” partaient chaque année à la retraite, alors qu’ils étaient au dernier compte [pdf] (rapport sur les pensions de la fonction publique 2012) 83 172 pour toute l’année 2012…

S’il a sous-estimé la casse dans le secteur public, il l’a lourdement surestimée dans le privé. À cinq reprises, François Hollande a ainsi martelé :

Il y a eu près de 400 000 emplois industriels qui ont disparu ces cinq dernières années.

Considérant que ces “cinq dernières années” étaient en fait celles du quinquennat de celui dont il souhaitait prendre la place, nous avons consulté les bilans de l’Insee. Et l’écart est de taille : au premier trimestre 2007, la France comptait 3,6 millions de salariés dans le secteur industriel. Au dernier recensement (quatrième trimestre 2011), ils n’étaient plus que 3,2 millions, soit 343 400 postes de moins. Un écart de 16% avec le chiffre du candidat socialiste, qui place pourtant en tête des objectifs de son programme la relance de l’industrie par la création d’une Banque publique d’investissement.

Largement fluctué

Chahuté par les journalistes pendant l’entre-deux-tours sur ses projets de régularisation, François Hollande a, comme il l’avait promis au soir du premier tour, abondamment évoqué l’immigration. Avant même de s’égarer en affirmant au 20 heures de TF1 du 24 avril que Nicolas Sarkozy avait été “responsable de la politique migratoire depuis 10 ans” (oubliant son passage au ministère des Finances), il s’avançait déjà sur le bilan de l’immigration choisie :

Aujourd’hui, nous sommes tombés à 15 000.

Sur l’immigration économique, les chiffres du candidat PS ont largement fluctué : le 29 avril, sur Canal +, il avançait le double, “30 000 à peu près”.

Malheureusement pour lui, les chiffres du ministère de l’Intérieur infirment les deux hypothèses : pour l’année 2009 (dernières données définitives disponibles), la place Beauvau comptabilisait 19 251 “premiers titres de séjour” (hors renouvèlement donc) délivrés au titre de l’immigration économique.

Quant à son estimation de “40 à 50 000″ titres de séjours accordés pour les conjoints étrangers, avancée le 15 mars dans l’émission “Des paroles et des actes” sur France 2, elle est supérieure de 12% aux chiffres du rapport au Parlement sur les orientations de la politique d’immigration du ministère de l’Intérieur (36 561 visas pour conjoint étranger en 2009).

À la pompe

Dernière proposition emblématique des trois derniers mois de campagne de François Hollande : le gel des prix du carburants. Pour étayer ce projet visant à améliorer le pouvoir d’achat des Français, le candidat socialiste s’est justifié par le poids des taxes dans le prix des carburants :

Sur 100 que nous payons pour les carburants, 60 ce sont des taxes, 40 c’est le prix réel du pétrole.

Mais c’était sans compter sur une subtilité bien connue des automobilistes : les taxes sont très différentes d’un carburant à l’autre. À la pompe, le Super sans plomb affichait 57% de taxes en 2011, selon l’Union française des industries pétrolières, contre seulement 49% pour le gazole. Or, pondérée par la consommation relative de chaque carburant (le second représente 80,1% du contenu des réservoirs français), la moyenne s’établit à 50,1%, soit 19,8% de moins qu’annoncé par François Hollande ! Ce qui ne l’a pas empêché de répéter le chiffre à trois reprises, au cours des interventions que nous avons vérifiées.

Une erreur cependant anecdotique comparée à celle qu’il a faite le 15 mars dans l’émission “Des paroles et des actes” sur France 2, où il annonçait que la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) rapportait 26 milliards d’euros par l’Etat… alors que, selon le Projet de loi de finances 2012 [pdf], sa collecte était en 2011 de seulement 14 milliards, soit 85% de moins !

Pour répliquer aux arguments de son adversaire lors du débat d’entre-deux-tours, François Hollande s’est risqué sur deux autres énergies, le gaz et l’électricité. Selon lui :

le prix du gaz lui il a augmenté de 60 % pour les consommateurs

Les bases de données du ministère du Développement durable, elles, annoncent une hausse de 8,32 euros à 8,99 euros pour le tarif de base (ménage à 100 kWh) durant l’année écoulée, soit une hausse de 8%, et de 7,20 à 8,99 depuis le début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, soit 25%. Deux chiffres inférieurs de plus de la moitié aux propos du candidat socialiste. Quant à son évaluation de “20%” d’augmentation du prix de l’électricité, elle s’avère tout aussi exagérée, puisque, sur le dernier quinquennat, elle plafonne à 12,7% selon la même source.

Si ces exemples ne constituent qu’un échantillon, l’intégralité des déclarations chiffrées vérifiées par Le Véritomètre durant ses trois mois d’existence resteront en ligne et consultables pour les cinq années de mandat qui débute ce jour. Cinq années durant lesquels nos bases de données seront mises à jour et étoffées pour suivre au plus près les déclarations du nouveau Président et de ses plus proches collaborateurs à l’Élysée (porte-parole, conseillers et secrétaire général) et permettre aux internautes d’évaluer avec les vérificateurs d’Owni leur crédibilité. Pour François Hollande comme pour les citoyens, le factchecking, c’est maintenant.


Les vérifications des interventions sont réalisées par l’équipe du Véritomètre : Sylvain Lapoix, Nicolas Patte, Pierre Leibovici, Grégoire Normand et Marie Coussin. Retrouvez toutes nos vérifications sur le Véritomètre et nos articles et chroniques relatifs sur OWNI
Photographie de la place de la Bastille le 6 mai 2012 par © Eric Bouvet via Picture Tank.
Illustrations par Loguy pour Owni /-)

]]>
http://owni.fr/2012/05/07/hollande-president-elu-verification/feed/ 14
Sarkozy mauvais emploi http://owni.fr/2012/02/22/sarkozy-chomage-emploi-chiffres/ http://owni.fr/2012/02/22/sarkozy-chomage-emploi-chiffres/#comments Wed, 22 Feb 2012 06:45:30 +0000 Sylvain Lapoix et Marie Coussin http://owni.fr/?p=99360

En lançant sa campagne sur la thématique du chômage, Nicolas Sarkozy s’est davantage inspiré des chiffres des sondages sur les préoccupations des Français plutôt que des statistiques les plus sérieuses du ministère de l’Emploi.

Dès sa déclaration de campagne au 20 heures de TF1, Nicolas Sarkozy a dégainé un chiffre-ritournelle, déjà présent dans son interview au Figaro Magazine du 11 février et depuis réutilisé à la tribune de son premier discours de campagne à Annecy le 16 février :

Aujourd’hui, il y a seulement 10 % des chômeurs qui sont en formation.

S’appuyant sur ce propos pour justifier sa première proposition importante sur la formation des chômeurs, le président-candidat surestime en fait lourdement les chiffres réels : selon l’organisme statistique du ministère du Travail (la Dares),  les dernières études disponibles comptabilisent seulement 8 % de demandeurs d’emploi en formation pour l’année 2009, soit une marge d’erreur de 20 % (cliquez dans les graphes ci-dessous pour les agrandir).

Une donnée un peu datée, elle remonte à 2009, mais c’est la dernière à avoir été publiée. Nicolas Sarkozy semble défier ce chiffre de 8% en affirmant à Annecy qu’ “à la minute où [il] vous parle” il représenterait 10%.

Soit le Président balance avec une assurance de bateleur une grossière approximation. Soit il a eu accès à des données non encore publiées, et donc soumises aux règles légales du secret statistique (garantissant l’équité des candidats et des citoyens devant l’information), avant de les étaler l’air de rien en meeting.

Nicolas Sarkozy aborde donc le thème de l’emploi en insistant d’abord sur la faible proportion de chômeurs en formation, avec des chiffres contestables, pour ensuite stigmatiser le coût de cette formation. Mais là aussi, dans le deuxième volet de son argumentaire, les chiffres se révèlent erronés.

Sarkozy se contredit de 5 milliards

Dès son interview donnée au Figaro Magazine le 11 février, il affirme :

Chaque année, 30 milliards d’euros sont consacrés à la formation professionnelle. Cet argent peut être et doit être mieux utilisé.

Cependant, une semaine plus tard, lors du discours d’Annecy, le même chiffre s’est effondré :

C’est une véritable révolution dans l’indemnisation du chômage qui ne sera possible que si notre système de formation professionnelle est complètement remis à plat. Mes chers amis, 25 milliards d’euros dépensés chaque année auxquels personne ne comprend plus rien, c’est un chantier immense qui va s’ouvrir.

Une correction inutile puisque, comme nous le confirme la Dares (tableau I), le bon chiffre (31,315 milliards d’euros en 2009) était bien plus proche de la première citation !

Cet indicateur biaisé se rapproche néanmoins de quelque chose : il s’agit en fait des dépenses de formation professionnelle pour le secteur privé uniquement (25,264 milliards en 2009), excluant les six milliards de budget alloués par la fonction publique à la formation de ses agents.

Mais l’erreur (consciente ou non) ne se limite pas au chiffre. Globalement, en mettant en parallèle la réforme de la formation des demandeurs d’emploi et le budget total de formation professionnelle, Nicolas Sarkozy forme un pont entre deux rives bien lointaines.

Si dans son discours les deux sont systématiquement associés, les dépenses de l’État pour la formation des demandeurs d’emplois ne représentaient en 2009 que 863 millions d’euros sur 7,963 milliards au total, tous publics confondus – l’État ne prend donc en charge que 10,9 % de ce budget.

Un chiffre par ailleurs en baisse de 5,9 % sur l’année. La majeure partie du budget formation de l’État demeure celui destiné aux jeunes (apprentissage, professionnalisation, accompagnement et insertion) précédant l’aide à la formation continue des salariés du public (2,9 milliards en 2009) et celle aux salariés du privé (1,37 milliard).

Désengagement

Or, le rôle de l’Etat est minoritaire dans le financement des stages de formation des demandeurs d’emploi : selon la base BREST de la Dares (p.2), seuls 12 % des stages pour les chômeurs sont financés par des budgets de l’État, contre 15 % par le Pôle emploi et surtout 62 % par les régions.

Depuis la décentralisation en 2004, ce sont trois fois moins de demandeurs d’emplois d’emploi qui bénéficient d’un financement d’État : de 256 760 au moment de la réforme, nous sommes passés à 68 151 en 2009. Une baisse maigrement contrebalancée par la montée en charge du Pôle emploi dans ce domaine, de 8 à 15 % des stages financés.

Ce transfert vers les collectivités territoriales n’a cependant pas été compensé par le soutien aux structures locales. Bien au contraire. L’avis de la Commission aux affaires sociales du Sénat sur le projet de loi de finances 2012 du Sénat note dans son volet « Travail et emploi » une action de sape budgétaire caractérisée :

Le projet de loi de finances pour 2011 prévoyait, initialement, de réduire de près de moitié les crédits alloués par l’Etat aux maisons de l’emploi (53 millions contre 95,5 millions en 2010). Des amendements parlementaires ont cependant atténué cette baisse et fixé la dotation à 77,4 millions d’euros. Le projet de loi de finances pour 2012 propose à nouveau une forte diminution des crédits destinés aux maisons de l’emploi (38 %).

Créé par le gouvernement Fillon en fusionnant l’Unedic et les Assedic, le Pôle emploi n’a pour sa part pas connu de baisse significative de ses moyens mais une stagnation. Le chômage, en revanche, a connu une hausse violente suite à la crise. Une conjonction relevée par ce même avis de la Commission aux affaires sociales :

Le nombre de chômeurs a augmenté de 30 % depuis la crise, sans que les moyens de Pôle emploi ne soient renforcés. De ce fait, l’opérateur n’a pu maintenir la qualité de service que les usagers sont en droit d’attendre en matière d’accompagnement et d’aide à la recherche d’emploi.

Or, comme en 2010 et 2011, la dotation de l’Etat s’établira pour l’année 2012 à 1,36 milliards d’euros. Des réalités comptables qui représentent le bilan du quinquennat en matière d’emploi.


illustrations et couverture par Marion Boucharlat et Ophelia Noor pour Owni

Retrouvez le Véritomètre i>TELE OWNI sur itele.owni.fr

]]>
http://owni.fr/2012/02/22/sarkozy-chomage-emploi-chiffres/feed/ 11